Spectateurs de Je suis un pays de Vincent Macaigne, aux Amandiers.



Le cauchemar ?
En arrivant au théâtre, je m’attendais à une pièce tout comme celle de Théo Mercier, « la fille du collectionneur », que nous avions vue au début de l’année.
Mais, en rentrant dans le hall d’entrée du théâtre, des personnes nous donnaient des bouchons d’oreilles. Je me suis alors demandé « pourquoi ? », sans pour autant trouver de réponse cohérente.
Puis, en avançant dans le hall pour retrouver le reste de ma classe, j’ai écouté la musique qui passait, on aurait dit l’hymne national portugais jouée au piano, à la manière d’une musique sinistre et terrifiante. Je me suis alors inquiétée sur la suite. Ensuite, de la fumée arrivait de plusieurs côtés et des images d’animaux à l’abattoir et de zombies défilaient sur un écran. La panique commençait alors à monter. Mais c’est lorsque j’ai lu « interdit aux moins de 16 ans, aux femmes enceintes et aux épileptiques » que la panique m’a saisie, jusqu’à avoir les larmes aux yeux.
Lorsque la file commença pour le début de la pièce, nous étions dirigés vers une grande « boîte » noire. Je me suis alors imaginée que nous allions être debout, que les acteurs iraient dans le public et qu’il y aurait de l’horreur et du sang.
Je ne suis pas arrivée à me calmer et entrer dans la salle… (Iris François)



 Je suis un pays, une pièce qui dénonce les êtres d’aujourd’hui?
La pièce de trois heures environ aborde un bon nombre de sujets plus ou moins sensibles
de  nos  jours :  que  ce  soit  la  religion,  la  politique,  ou  encore  l’absurdité  des  jeux  télévisés
(téléréalité), mais aussi les relations au sein d’une même famille. Bien que ces domaines soient
pratiquement tous totalement différents, ils ont cependant un point commun : la place, le rôle de
l’Homme au sein de chacun.
En effet, très vite, on se rend compte des actes que certains sont poussés à faire face à un
compromis  ou  un  conflit  :  la  pièce  débute  avec  une  tirade  d’une  mère,  parfois  agrémenté  de
l’intervention de ses enfants et, sous le coup de la menace, celle-ci n’hésite pas une seconde à
délaisser sa progéniture face à la prophétie qui les attend. Ainsi, entre en jeu le premier sujet dit
« sensible » qu’est la religion, avec « Marie Curry » telle l’incarnation de la Vierge Marie (telle que
j’ai  pu  l’interpréter),  accompagnée  de  son  frère  Eddie.  Très  vite,  la  prophétie  s’abat  sur  eux  et devant nous se joue une scène quelque peu violente et (parfois) tabou ; celle du viol de Marie (par
ce qui est figuré être un ange). Marie abandonne son enfant - celui-ci ne réapparaîtra qu’à la fin
de la pièce, ce qui clôturera cette dernière. Elle décide ainsi de prendre en main le destin d’elle
même, plutôt que de répondre à la prophétie lui ayant été attribuée.
D’autre part, la pièce tourne très vite à l’absurde, avec des costumes ridicules (présents
cependant  dès  le  début),  et  l’intervention  de  deux  soi-disant  présentateurs  de  télévision,  qui
démontrent  par  la  suite  la  folie  d’un  participant  au  jeu  télévisé  qu’ils  animent.  Ce  dernier,  pour l’argent et la gloire, est prêt à tout, même à tuer autrui pour les acclamations. Le personnage est
ridicule et hystérique, telle une parodie plutôt macabre des participants à ce même genre de jeu.
On voit une volonté de dénoncer l’absurdité d’un jeu de la sorte et ce qu’il pousse certains êtres à
devenir, et effectuer.
Plus tard, le sujet de la politique est abordé, avec de part et d’autre de la pièce un bon
nombre  de  figures  cartonnées  d’hommes  et  de  femmes  politiques,  faisant  partie  de  différents
partis. A l’avant de la scène, trois acteurs se trouvent et délivrent chacun un discours. L’un est
parodié, sexualisé puis dénudé, l’autre est prêt à tout pour se faire entendre, tandis que le dernier
entre en frustration, folie presque, face à ce sujet sensible.
Ainsi, face à ces trois domaines que l’on aborde souvent avec précaution, on parvient à
déceler, il semblerait, une critique réelle des êtres humains et de leurs actions en vue du pouvoir
et de la reconnaissance.
Par  ailleurs,  la  pièce  évoque  une  certaine  proximité  avec  le  public,  puisque  les  acteurs
interagissent  avec  eux,  de  même  que  certains  autres  éléments  de  la  pièce  elle-même:  on  se
retrouve souvent submergés par une fumée intense par exemple, celle-ci nous brouillant parfois la
vision. De même, les acteurs étendent et poursuivent leur jeu au sein même du public, n’hésitant
pas  à  escalader  les  sièges.  Nous  sommes  parfois  même  invités  sur  scène  pour
alimenter « l’ambiance »  d’une  scène  ou  à  l’entracte.  Il  est  vrai  que  durant  cette  dernière,  un
acteur (Eddie) s’adresse directement au public, énonçant un discours agrémenté de « Ne partez
pas ! Je vous aime ! ».
Ainsi, Je suis un paysest une pièce ludique, parfois dérangeante mais pourtant captivante,
proposant une immersion totale des spectateurs. (Salomé Baude)