Spectateurs de La mélancolie des dragons au Théâtre des Amandiers

     À la suite de ce spectacle, les étudiants de MàNAA ont adressé une lettre à son metteur en scène, directeur du Théâtre des Amandiers, Philippe Quesne.

 

"Lettre à diction ouverte.
Ok, Pourquoi pas Philippe.
 
À la recherche d'un nouvel esthétisme.. C'est une désagréable impression, celle d'être mis à l'écart d'un drôle de jeu. Un jeu de plateau. Un plateau de jeu...Oh pas un monopoly, non non...plus un scrabble ! Un scrabble qui puerait le vieux cuir et l'essence. Qui s'agiterait à chaque coup de cordes, à chaque scorpion. Malignement placé. Entres deux canettes de bière et six énergumènes. Trop -(p)heureux de se faire piquer. Un scrabble en famille c'est toujours long, et ça demande beaucoup de réflexion. J'y réfléchirai donc... Savoir ce qui cloche... Pourquoi moi je ne peux pas jouer. Pourquoi je ne veux pas y jouer... T'as pas de réponses toi ? Non. Ce serait tricher. Un peu comme cracher des bulles et souffler de l'eau. Ça gâcherait le plateau...Tu m'excuseras donc de voir ta pièce comme un jeu parricide. Parricide de normalité. Comme du plexiglas couvert de cheveux moites et de doigts lisses.
Faussés !
Tu m'excuseras d'y voir des pions sans goût et sans odeur. Martyriser par deux dragons aux cigares qui dérangent. Et qui fument entre deux papiers mouillés des vapeurs nauséabondes. Grignotant des chips trop grasses dans une voiture trop petite. Je crois.. Je crois qu'il manque la lettre E. Celle un peu graissée...tu vois. Celle utile. Volée dans la pioche ?
Je regardais d'en haut, je voyais tout. Et je retenais mal.
C'était violent, c'était agréable." Sarah Robin

 
 
"À l’attention de Monsieur  P.Quesne                                                                 20 /01/2015
 
Donner la parole à  cet univers,  l’habiter d’éléments  incongrus,  ne pas s’attendre à.
Ne pas s’attendre tout simplement .
Dans la salle personne ne bouge,  la musique se répand, on sourit  au voisin, tout le monde connaît ses classiques, le geste prend place, la parole s’incline, nous devenons passagers  et attendons le prochain morceau .

Faire semblant de ne pas être,  faire tomber les masques ou la perruque, démonter les codes,  créer avec peu mais imaginer beaucoup,  s’inventer un monde, y croire pour le voir - ceux  qui n’ont pas cru ont  dû se perdre en chemin, Isabelle a vu, alors pourquoi pas nous. 
L’apologie du ‘’ tout est faux’’ , même nous, m’a traversé l’esprit. 
Votre pièce m’a fait l’effet d’un magicien qui sort de son chapeau  un  lapin dont les oreilles dépassent, on nous montre tout,  on ne cache rien et pourtant. 
Pourtant le doute s’installe,  qui sont ces hommes au sourire avenant et à  la chevelure synthétique, vendeurs de rêve, charlatans, artistes de l’éphémère qui transcendent  une bassine en fontaine, une voiture en montagne ?
Haussement de sourcils, que font-ils ?  ça, un parc  ?
Un parcours  onirique peut être ? 10% d’ustensiles, 50% d’immatériel.
Le texte n’a pas la primauté, il illustre plus qu’il ne raconte, ponctue telle une virgule entre une bulle de savon et un courant d’air. 
Des inventeurs, des fous, le doute subsiste encore, cette effervescence d’idées, d’objets  qui sortent  de nulle part et ‘’cette  scène‘’ aux perruques  flottantes qui semblent rire à la face de leurs voisines et qui tombent tout autant qu’elles, du chien jusqu'à l’échelle,  je ne prends  ni l’un ni l’autre.      
Cet univers reste à  mes yeux un intrigant cocon surréaliste. Une phrase brillant dans la nuit avec le regard sombre et le sourire en coin d’un Antonin Artaud qui suspend ce moment,  qui il me semble pourrait se jouer éternellement malgré la disparition de nos regards et l’incompréhension de certains. 
Méditons ou rions sur la mélancolie , le dragon sommeillait, son souffle nous a touchés."               
Cassandra Bévillon  
 

 
"Ce qui a été très étrange aussi était qu’il n’y avait pas vraiment d’intrigue à laquelle se raccrocher, je m’attendais à tout moment que le spectacle sorte de la rythmique « Eh Isabelle, viens voir… - Oh ! Bah ça… », mais je pense que c’est l’une des choses qui rend ce spectacle hors-norme. Par notre nature nous cherchons toujours à classer, organiser ce que l’on voit, mais lorsqu’il n’y a pas de case où les classer, cela nous paraît « bizarre ». Par la suite, on voit d’autres choses similaires, que des personnes engagées, audacieuses, inventent, et cela suffit pour créer et nommer, ou pas,  cette nouvelle case. C’est ce que La mélancolie des dragons a provoqué (...)
     Je pense finalement que la mélancolie vient surtout du spectateur qui est à la fois amusé et perturbé de manière intermittente. En trois mots ce spectacle était Etrange, Amusant et Hors-norme."
Barbara Vignaux
 

 
"Ils présentent leur activité (des concerts assourdissants !), comme des enfants qui montrent leur dernier dessin à leurs parents. Ils transportent leur rêve commun, le parc d'attraction, minimaliste, amateur, et en montrent chaque partie à Isabelle, une spectatrice étrangement attentive, comme à une mère. Sont-ils épicuriens ? Ou Est-ce parce qu'ils n'ont rien d'autre, ni les moyens ni le choix ?"
Julie Nahon
 

 
"Cinq bâches noires de 6 mètres de haut qui cachent les rockeurs. Dans l'obscurité de la nuit, soulignées de quelques traits de lumière, elles se penchaient sur la "mère" de ces enfants. Elles semblaient représenter leurs cauchemars : des ombres, de grosses masses, la peur du noir, dans le silence total. Ou bien ils symbolisaient leurs déceptions à réelle échelle ? C'était un moment triste"
Julie Nahon

 



"Monsieur Philippe Quesne,
La Mélancolie des Dragons c'est un paysage enneigé, des sapins qui cachent une scène trop présente lors du spectacle, c'est un mobil-home tiré par une petite voiture, ce sont des Curly dévorés à pleines dents, ce sont des perruques installées sur le crâne des acteurs le temps d'une représentation, ce sont des grands gamins, des dragons créateurs, des fans incontestés de Rock mettant en avant leur répertoire bien garni, c'est aussi une exposition de cheveux qui tombe à l'eau peu à peu, ce sont des sourires à son voisin lorsqu'une chanson nous rappelle un souvenir, c'est de la flûte au sein d'un groupe très rock, c'est de la fumée épaisse qui nous embaume à deux reprises, c'est l'envie de créer, tout simplement.
Comment poser un seul adjectif pour qualifier un spectacle qui laisse aussi pantois ? Pourquoi vouloir s'interroger et chercher du sens là où il n'y en a (peut-être) pas ? Il faut regarder, apprécier ce que l'on voit au moment présent sans pour autant se poser une multitude de questions après un tel spectacle.
Etonnamment, c'est ce silence, en fin de spectacle, qui m'a mise mal à l'aise et a eu le plus de sens selon moi. «Pourquoi des bâches noires ? Pourquoi debout ? Pourquoi c'est aussi silencieux ? Est-ce que ça va s'arrêter ?» Le temps était suspendu pendant un moment. Ce passage était très émouvant, comme une pause dans le spectacle pour interroger le spectateur sur ce à quoi il était en train d'assister : un paysage sombre et presque terrifiant, une pause noire, une bile noire, de la mélancolie. Du début à la fin, un méli mélo de sentiments qui vacillaient aussi vite que les titres farfelus du parc d'attraction. Finalement, le créateur d'un tel spectacle est le plus grand des mélancoliques."
Agathe Vastel
 
 
"Bonjour Philippe, Je peux vous appeler ainsi ? Moi c'est Annaïs.
Je vous écris alors que mon réveil affiche 3h27 du matin. Je le fais tant que mon rêve est encore frais. Parce que cette nuit j'ai fait un rêve qui devrait vous plaire. On dit souvent que c'est dans les rêves que nous puisons l'inspiration. Puisse mon esprit fécond vous servir. C'était en hiver, en pleine forêt. Et pourtant je n'avais pas froid. Je me sentais un peu perdue au milieu de tous ces arbres. Puis j'aperçus de la lumière provenant d'une voiture. Une Citroën AX je crois. Non, je suis sûre. Avec des gens à l'intérieur. Ils étaient très stéréotypés. Cela m'a permis de reconnaitre instantanément une bande de rockers, des hards-rockers même. Je me suis sentie moins perdue. Les chansons qui défilaient dans la voiture je les connaissais, je les chantais. Et, comme un élément perturbateur, une femme est arrivée. Elle était si discrète que je ne l’avais pas vue. Cela me surprit. Elle semblait aussi perdue que moi. Et, comme moi, lorsqu'elle vit le groupe, elle s'y attacha. Je me souviens avoir ri d'une chose au réveil. Enfin plusieurs même. Rire c'est un peu fort. Je dirais, sourire. La vieille dame qui s'était approchée du véhicule, avait tenté de le réparer, balançait des pièces à droite à gauche, avec pour résultat de faire sortir de la fumée du capot. Au lieu de faire redémarrer le véhicule, cela n'avait fait qu'empirer les choses. Elle avait l'air dépité. Je n'arrivais pas bien à savoir ce qu'elle pensait de tout ça. Comme si elle était détachée des évènements qui se déroulaient. Elle s'appelait Isabelle cette dame. J'entendais son nom partout. Je la plaignais, elle n'avait pas un seul moment de répit. On l'appelait, encore et encore, pour tout et pour rien. Mais surtout pour rien. C'était des broutilles, des idioties. Et pourtant, à chaque fois, elle réagissait comme si c'était extraordinaire. En fait on aurait dit une personne simple d'esprit. Ils étaient tous comme ça. A s'émerveiller des petites choses de la vie, des choses simples, qu'en temps normal nous ne remarquons pas. Il y a eu une chose qui m'a touché dans ce rêve. C'était les bulles. Je ne sais pas vraiment pourquoi, mais devant ça, moi aussi je me suis émerveillée. C'était une attraction je crois. Même si ça me paraissait ridicule que c'en soit une. C'était de simples bulles. Des bulles de savons, qui s'élevaient dans l'air, s'envolaient... J'aurais voulu que mon rêve s'arrête là. Au lieu de ça quelque chose d'étrange s'est produit. Je me suis sentie oppressée, enfermée. Des formes immenses, noires, se sont mises à m'entourer. Je pris peur. Et d'un coup je remarquai qu'elles avaient la forme de céréales, de "trésors". Et la pression retomba, les masses noires aussi, me laissant me réveiller. J'arrive ici à la fin de ce rêve qui me laisse confuse. Je vous ai conté tout cela, mais en réalité, ce ne sont pas les choses dont je me suis souvenue en premier. Je me suis rappelée de ces deux adorables chiens qui jouaient dans la neige, et là, j'ai ri.
Bien à vous
"
Annaïs Helou
 
 
"Cergy, le 21/01/2015
                            Monsieur Quesne
         "Curiosité" serait-il le mot pour décrire votre pièce ?
         Cest pourquoi, jai décidé de vous écrire cette lettre à la manière dont le personnage d’Isabelle sexprime.
 
         Le parc dattraction existe-il vraiment ?
         Où sont passés les dragons ?
         Dailleurs, se sont-ils décidés pour le nom ?
 
         Isabelle se promène souvent seule, la nuit dans les bois enneigés ?
         Sy connaît-elle vraiment en mécanique ?
         Comment a-t-elle pu se faufiler dans le capot de la voiture ?
 
         Il y avait de vrais chiens sur scène ?
         Pourquoi des chiens ?
         Ont-ils un lien de parenté ?
 
         Que mettez-vous dans les immenses sacs plastiques ?
         Était-ce une illustration de la mélancolie contemporaine ?
         Que projetez-vous dans ce grand corps noir rempli de vide ?
 
         Le dialogue a-t-il encore de limportance ?  
         Ça consomme beaucoup une Citroën AX ?
         Pourquoi rompre sans cesse lillusion du décor ?
 
         Reste-il de la poésie dans le quotidien ?
         Cherche-t-on à faner le réel ?"
Camille Yang
       

 
 
 
 
 

 

 

      
 
 

 
 
 
 

 

Spectateurs du Futur faisons table rase, aux Amandiers

Les étudiants de MàNAA ont assisté au Théâtre des Amandiers, au spectacle de Théo Mercier, Du futur faisons table rase.


     "Le soir de ce vendredi 5 décembre, je me suis rendu au théâtre en ne sachant à quoi m'attendre. Je n'avais souhaité lire ni critiques, ni synopsis, afin de me laisser surprendre. Quelle fut ma stupeur... dès la sortie en gare de Nanterre !
     Un très jeune couple nous demande la direction du Théâtre des Amandiers. Cet événement m'interpella, car aucun des deux individus n'avait l'allure des personnes que l'on rencontre généralement au théâtre.
     En arrivant sur le lieu, quelques éléments éveillèrent davantage mes soupçons quant à la singularité de la pièce à laquelle j'allais assister. Tout d'abord les quelques particuliers  postés devant le bâtiment, buvant une bouteille de vin au goulot. Si on les avait trouvés devant Paris Bercy, attendant d'assister à l'apparition scénique de leur idole, je les aurais à peine remarqués. Cependant, dans le contexte présent, ils attiraient davantage ma curiosité.
     En entrant dans le hall du théâtre, je perçus, avec un style vestimentaire démarqué, une population jeune fortement présente. Cela ne fait que renforcer mes soupçons, d'autant que trois employés du théâtre étaient postés à l'entrée afin de distribuer des boules Quiès.
     Ce n'est que durant la troisième partie de la pièce que j'ai pu affirmer mes conjectures. L'apparition du groupe Sexy Sushi a eu l'effet d'une claque, d'une douche froide, d'un glaçon coincé dans la nuque. Leur énergie déferlante, la lumière électrisante, les décibels rugissants, on aurait pu se croire dans une rave party à la piscine Molitor. Mais le plus frappant reste la réaction du public, d'une inertie mémorable. Malgré la présentation d'un déchaînement anarchiste, les individus assis semblaient sculptés - même une photographie n'aurait paru si statique.
     Une impression de mur séparant la scène des gradins n'a jamais été aussi forte. On y percevait très nettement deux univers, deux rythmes dans l'écoulement du temps, deux forces : l'une dans l'énergie, l'autre dans la masse. Ces deux mondes en confrontation, d'une si grande intensité, n'ont pu perdurer. Tout cela a fini par s'évanouir dans un épais brouillard artificiel. Eclipsant par sa manifestation la beauté d'une différence."
                                Camille Yang
 
 
     "Une sorte de petit concert intégré sur une grande scène"      Alexandre Samson
     "La musique occupe alors tout l'espace et nous déconnecte de toute réalité, elle nous immerge dans une énergie ultra-violente"                                                   Charlène Scribe
 

 
 
     "Leur façon de rester totalement immobile pendant le reste du spectacle (avant et après) était intéressante, comme si le passé ne se mettait en marche que quand on le voulait (si on veut s'en souvenir par exemple), et sinon il ne bouge pas : c'est le passé."                                     Héléna Ziakas

 
 
 

"Performance poétique dans sa lenteur"         Alexandre Samson
 
 

 
     "Mais ce qui rendait la scène encore plus drôle était les moments où un message tombait du haut de la scène, suspendu par un fil : à chaque fois la femme hurlait de façon grotesque, la bouche pleine, comme si elle avait la prémonition qu'un message allait arriver"                                           Laura Vien
 
 
 
 
"Le contraste est saisissant. Je fais des sauts dans le temps. Le spectacle est pour moi comme des montagnes russes : j'apprécie, puis je déteste, je me laisse emporter parce que je vois, je cherche un sens, je me lasse... Confusion créée par le mélange constant du passé, du présent et du futur..."  Joyce Da Penha Sanches
 
"Cette pièce de théâtre m'a semblé tout droit sortie d'un rêve, d'une hallucination. En fait je suis restée durant toute la durée du spectacle, à me demander si ce que je vivais était réel".     Marion Robin
 
 
 
         "Il y a de drôles de choses à dire. Il y a tout autant à voir.
          Une soirée en dix minutes. Top chronologique.
 
          Il serait aimable d'apprécier. Il serait triste de raisonner...
          Un hommage à l'art avec des relents d'affinage.
          « Ou quand l'artiste dit vague. »
          Un postiche délicieusement mené
          par des saveurs amères, de fumée et d'oreilles.
          Un lait de vache qui prend forme,
          un cri de corbeau joyeux,
          Et un peu de Philippe Katerine.
         Une démonstration humaine qui dit oui à rien
          qui dit non à tout. Ou peut être est-ce l'inverse ?
          Un peu d'écriture éponyme et du tissu décadent.
          On y ressortira aux bras d'un homme.
          Un homme « spaghetti ». "                 Sarah Robin